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Azouz Begag veut "banaliser" la diversité dans la société française

LE MONDE | 10.09.05 | 12h59  •  Mis à jour le 10.09.05 | 13h00
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Que pensez-vous des récentes évacuations de squats auxquelles la police a procédé sur injonction du ministre de l'intérieur ?

A chaque fois que l'on prend des mesures de fermeté, coercitives, il faut qu'elles soient complétées par des mesures de générosité. Le renforcement de la lutte contre l'immigration clandestine doit aller de pair avec des efforts accrus en matière d'accueil et d'intégration. De même, l'évacuation de squats ne peut se concevoir sans solution de relogement pour les personnes expulsées. C'est l'enfant des bidonvilles qui parle, l'enfant qui a vu des baraques brûler.

Une mesure sous conditions

Dans un rapport adopté le 5 juillet, la Commission nationale Informatique et libertés (CNIL) a tenu à clarifier les conditions de mesure de la diversité dans les entreprises. En l'état de la loi, les statistiques "ethno-raciales" sont proscrites. Seule est autorisée la collecte de la nationalité du salarié, de sa nationalité d'origine, et celle de ses parents. Il n'est en revanche pas possible de demander aux individus de choisir une appartenance ethnique type ("Arabes", "Maghrébins"...).

Pour recueillir des données sur la race, il reste possible de procéder à une enquête anonyme, pourvu que les données recueillies soient ensuite détruites. Mais la CNIL censure tout questionnaire nominatif, jugeant que le consentement des salariés est, dans ce cas, biaisé.


Comment comptez-vous agir ?

C'est à moi d'incarner cette humanité. C'est pour cela que je suis là : pour aller à La Courneuve avec des livres, des actions apaisantes ; pour donner à la police un visage humain...

J'ai rendu visite, sans caméras, à l'une des familles rescapées de l'incendie du boulevard Vincent-Auriol. Avec mes collaborateurs ­ aux origines très diverses ­, nous allons passer un ou deux jours par mois dans les quartiers à l'écoute des gens. En agissant ainsi, j'ai le pouvoir de la parole et de l'authenticité, j'ai le sentiment d'être crédible. Je cherche à appliquer ce que le chercheur -au CNRS- que je suis a conceptualisé depuis vingt ans. J'ai une marge de manoeuvre totale. Personne ne me dit ce qu'il faut faire et ne pas faire.

Les conditions éprouvantes dans lesquelles vivent nombre de familles d'origine africaine ne sont-elles pas aussi la conséquence de discriminations ?

Je vais rencontrer tous les préfets pour les persuader que la première amorce de l'égalité des chances, c'est le logement. Et leur demander qu'ils veillent à ce que dans les commissions d'attribution des logements sociaux, la diversité soit respectée.

Il faudrait aussi que chaque personne qui se présente à un rendez-vous pour visiter un appartement et se voit dire que celui-ci a déjà été loué, puisse se signaler à la société. La discrimination est un délit. Et là où il y a délit, j'aimerais que la police nationale s'en mêle. Je souhaiterais que des équipes de policiers soient formées sur ce terrain de la discrimination.

Votre ministère est, par nature, transversal. Comment comptez-vous peser au sein du gouvernement ?

Je vais lancer avec le ministre de l'éducation nationale, Gilles de Robien, une action baptisée "collèges ciblés" pour relever le défi de l'égalité des chances dans ces établissements fuis par les élèves des classes moyennes et aisées et qui deviennent réservés aux "minorités visibles". Ainsi dans une vingtaine de "collèges de relégation", nous allons donner aux professeurs la possibilité d'expérimenter des formes innovantes de pédagogie, d'encadrement. Je souhaite que les élèves puissent sortir de leur collège en disant non plus "j'ai réussi" ­ - ce qui suppose d'être entré dans le moule - ­, mais "je me suis réussi".

Je voudrais aussi faire en sorte qu'il y ait un peu plus de concordance entre l'équipe nationale de foot "black-blanc-beur" et la composition de l'hémicycle à l'Assemblée nationale, le personnel des entreprises, les présentateurs télé. En mars 2001, Marc Tessier, alors président de France Télévisions, s'était engagé à favoriser la diversité sur les écrans, mais où est aujourd'hui la diversité ? J'aimerais voir des Noirs à la télévision. Il faut faire avancer la diversité dans les entreprises.

De quelles façons entendez-vous y parvenir ?

On doit donner les moyens à l'entreprise de rendre compte de la diversité en son sein. Nous allons lancer en partenariat avec l'Institut national d'études démographiques (INED) et quatre entreprises (SNCF, L'Oréal, Axa et Eau de Paris) une enquête expérimentale pour évaluer le degré d'ouverture de l'entreprise à la diversité ethnique et culturelle.

Dans ce pays, on n'ose pas prononcer le mot "Arabe" ou "Noir". Mais à force de cécité politique, on s'interdit de penser un progrès possible. La composante multicolore sera banalisée dans les entreprises, les collectivités, lorsque l'on n'aura plus peur de désigner les Français de couleur. Dans la rue, la désignation noire existe, elle est socialement vivante, mais on n'a pas le droit de montrer statistiquement ce qu'elle représente dans la société. Il n'est pas honteux d'être arabe, kabyle, africain.

Vous parlez aujourd'hui, non plus de discrimination positive, mais de diversité. N'est-ce pas là qu'un jeu sémantique ? Votre raisonnement ne conduit-il pas à mettre en place des quotas comme le prône Nicolas Sarkozy ?

Je ne vais surtout pas remplacer une rigidité par une autre. Il faut inoculer dans le corps social le virus de l'origine pour se débarrasser de la question de l'origine dans le corps social. J'utilise en quelque sorte la méthode Pasteur.

J'ai dit, les yeux dans les yeux, à Nicolas Sarkozy que je n'étais pas pour la discrimination positive. La discrimination territoriale comme cela se fait pour les zones d'éducation prioritaires (ZEP), d'accord. Mais je suis contre la nomination de préfets au regard de leur religion. Il faut cesser de mettre au sein de l'espace public la question de l'islam. Cela brouille complètement les cartes de l'intégration des personnes dans l'espace laïque.

Auriez-vous pu être un ministre de Lionel Jospin ?

Non. Les socialistes ont totalement institutionnalisé le combat contre les discriminations à travers SOS-Racisme, ils l'ont jacobinisé, parisianisé, et se sont détachés de la base.

Avez-vous accepté ce ministère sans hésiter ?

Cette nomination était une surprise totale. J'ai évidemment demandé son avis au Père Delorme [l'initiateur de la Marche pour l'égalité, en 1983], auquel je suis lié depuis des années. Il m'a dit que je n'avais pas le choix. De fait, lorsque Dominique de Villepin m'a annoncé ma nomination, il n'a pas attendu ma réponse. Il m'a dit : "A demain." Je pense que l'on ne reviendra jamais en arrière. Il sera désormais difficile de composer des gouvernements sans ministres issus de l'immigration.

Propos recueillis par Jean-Michel Dumay, Béatrice Gurrey et Laetitia Van Eeckhout
Article paru dans l'édition du 11.09.05
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Le ministre délégué à la promotion de l'égalité des chances Azouz Begag , lors de la conférence "Juifs, musulmans et citoyens..", le 27 juin 2005 à Lyon. | AFP/PHILIPPE MERLE
AFP/PHILIPPE MERLE
Le ministre délégué à la promotion de l'égalité des chances Azouz Begag , lors de la conférence "Juifs, musulmans et citoyens..", le 27 juin 2005 à Lyon.

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