Travaux sur toile, peau et papier

 ABOUELOUAKAR  AZOUZI  BELKAHIA  BINEBINE  KABILA  KACIMI KANTOUR  MILOUDI  QOTBI  RABI  YAMOU

 Livres de bibliophilie

 M. Bennis  E. A. El Maleh  A. Gorius  M. Kacimi  A. Khatibi A. Laâbi  J-P. Millecam  R. Nasrallah  M. Nissabouri N. de Pontcharra

Galerie Al Manar, Casablanca

exposition du 13 février au 5 mars 2001

Vernissage le mardi 13 février à 19 h

Les livres de bibliophilie édités par les Editions Al Manar, Casablanca-Paris, et les ouvres des plasticiens qui les ont accompagnés de dessins et de  gravures :

ABOUELOUAKAR, AZOUZI, BELKAHIA, BINEBINE, KABILA, KACIMI, KANTOUR, MILOUDI, QOTBI, RABI, YAMOU

textes de Mohammed Bennis, Edmond Amran El Maleh, Alain Gorius, Mohammed  Kacimi, Abdelkébir Khatibi, Abdellatif Laâbi, Jean-Pierre Millecam, Raja  Nasrallah, Mostafa Nissabouri, Nicole de Pontcharra

Présentation des premiers exemplaires de Ayn, le nouveau livre de  Jean-Clarence LAMBERT  (poète, essayiste et critique d'art, membre du groupe Cobra)  rehaussé d'une teinture sur peau et d'une gravure originale sur cuir de  chameau  par Farid BELKAHIA.

Edition de bibliophilie, soixante-dix exemplaires typographiés à la main sur  Vélin d'Arches,  dont douze ex. de tête présentés sous étui parchemin / vélin réalisé par  Emmanuelle Joseph.

    Livres du plus grand nombre, livres de quelques-uns. Nous avons voulu, en  tant qu'éditeur, distinguer nos livres de la production de masse. Ces livres  sont des ouvrages de bibliophilie : ils sont, inévitablement, coûteux, car  fabriqués selon les méthodes artisanales, imprimés en typographie sur vélin  d'Arches, pliés à la main, illustrés selon les procédés traditionnels  (gravure sur cuivre ou, à titre exceptionnel, sérigraphie ; les vingt  premiers exemplaires, revêtus de compositions ou de peintures originales,  sont des ouvres uniques), et leur tirage ne dépasse pas quatre-vingts ou  quatre-vingt-dix unités. Autant de limitations, pleinement acceptées, qui  distinguent ces ouvrages et justifient l'intérêt des collectionneurs : la  réalisation du projet que nous avons formé avec l'auteur et le peintre qui  travaille avec lui est contrôlée de bout en bout. Ce que ne permet évidemment  pas l'édition industrielle. Ouvrages de luxe ? Sans aucun doute - mais, nous  l'espérons, au meilleur sens du terme. Nous nous sommes efforcés d'éviter le  "demi-luxe", encore appelé "faux luxe".

    "Durant tout le XIXe siècle, l'image matérialise un propos. Désormais [.]  le dessin a cessé d'être le commentaire de la parole, il est devenu par  lui-même une évidence." (P. Francastel) Quel rapport nos peintres ont-ils  entretenu avec le texte qu'ils ont rehaussé de leurs images ? Il nous a  semblé que l'illustration ne devait pas lutter avec l'écriture, ni se plier  servilement au texte : sans exacte correspondance du sujet avec l'écriture,  elle devait former plutôt un accompagnement de lignes expressives. De ce  parallélisme du langage plastique et du langage poétique, nous avons fait  notre politique éditoriale.

    La présente exposition juxtapose treize livres, écrits par différents  auteurs français ou marocains et illustrés par onze artistes-peintres  marocains parmi les plus réputés, et de nombreuses ouvres sur toile ou sur  papier, des mêmes artistes. Elle a le mérite de montrer que ni la taille de  l'ouvre, ni le support sur lequel elle est réalisée, ne sont déterminants. Et  que ce sont bien l'image, poétique et plastique, et l'Idée, présentes en tant  que principes dynamiques au cour du travail du poète et du peintre, qui  permettent à ceux-ci de se retrouver, complices, en terrain de connaissance.

    On trouvera aussi à la galerie les exemplaires courants, en textes nus,  des livres que nous avons édités.

Alain GORIUS

Dans le Silence poème de Nicole de Pontcharra, dessins et gravures de Mohamed Abouelouakar

    Quand il peint, Abouelouakar multiplie les formats - tout en gardant une  place privilégiée à la miniature, dans laquelle il excelle - et les supports,  toile, tissu, écorce de bouleau, papier-émeri, gaze médicale, papiers de  récupération qui conservent en eux les stigmates  d'une autre existence.     Le travail réalisé par Abouelouakar pour accompagner le texte de Nicole  de Pontcharra, alors qu'il se trouvait en résidence à la Cité internationale  des Arts, à Paris, est un hommage du peintre au poète, et un signe d'amitié.  Ce livre témoigne d'une double recherche de l'absolu : on y entend, s'y  répondant en écho, la parole du poète et l'esprit de la peinture.     Nicole de Pontcharra, poète et critique d'art, russe d'origine, a vécu  dix ans à Marrakech, qu'elle a quittée à l'âge de dix-neuf ans ; elle a  publié différents recueils de poèmes et monté au Musée d'art contemporain de  Grenoble, dont elle a été conservateur-adjoint, de nombreux événements - et  notamment une grande exposition de peinture marocaine contemporaine (1984)  qui a fait date. Mohamed Abouelouakar, peintre et cinéaste, né à Marrakech en  1946, vit et travaille à Casablanca et à Moscou.

Dans le Silence : 20 ex. de tête rehaussés d'une peinture originale et d'une  gravure de Abouelouakar ; 10 ex. EA rehaussés de deux peintures du même  artiste ; 4 ex. exceptionnels comportant une peinture et deux gravures ; 56  ex. comportant deux gravures.

 Marrakech, lumière sur lumière poème de Nicole de Pontcharra, peintures et gravure de Farid Belkahia

    L'auteur a passé une partie de son enfance à Marrakech, cité dont elle a  gardé un souvenir ébloui. Femme de lettres et de culture, esprit curieux de  tout, et ouvert à tous, Nicole de Pontcharra a écrit là un de ses plus beaux  textes, qu'a su magnifier un Farid Belkahia au sommet de son art : sa  peinture sait recouvrir, souveraine, la page qu'elle envahit sans porter  ombrage au texte ; elle évoque le brun des murailles de la ville impériale,  et toutes les nuances de sa lumière. La gravure qu'a donnée Belkahia,  pyrogravure sur cuir de chameau, donne quant à elle à voir, à toucher  dirait-on, le grain de la peau de l'animal, emblème du Sud, et du long  voyage. Caravanes, chères au poète et au peintre. L'on n'est plus très loin  ici de Klee ; et du meilleur de la culture marocaine, que chante Pontcharra  en chantant Marrakech.

Marrakech, lumière sur lumière : 25 ex. de tête rehaussés d'un dessin  original et d'une pyrogravure de Belkahia ; 60 ex. avec la seule gravure.

 Ismaël et le chien noir Nouvelle de Jean-Pierre Millecam, peintures de Mohamed Azouzi

    Si la peinture d'Azouzi s'est affirmée loin du Maroc, sa sensibilité, son  imagination créatrice n'ont pas varié d'un iota depuis qu'à vingt ans il  quittait l'Afrique du Nord. La tonalité de son ouvre est restée africaine :  cette peinture totalement moderne vient bien du Tafilalet. C'est en s'ancrant  dans le souvenir de cette région du monde qu'Azouzi atteint l'universel. Il  est peintre comme Millecam est romancier. Et c'est parce que ses racines sont  profondes qu'il a su si bien évoquer dans ce livre, par le biais de collages  dont l'ocre chante la terre natale, le Maroc frémissant de toutes les  promesses de l'Indépendance et saisi dans les douleurs de l'accouchement de  lui-même que raconte magistralement Jean-Pierre Millecam dans Ismaël et le  chien noir.     Jean-Pierre MILLECAM, né en 1927 à Mostaganem, s'est installé en 1992 à  Nice, où il poursuit son ouvre ; il a publié à ce jour neuf romans chez  Gallimard, Denoël, Calmann-Lévy, La Table ronde, et un essai sur Jean  Cocteau, aux éditions du Rocher. Mohammed AZOUZI, né vers 1946 à Casablanca,  vit et travaille à Paris depuis 1970. Il figure notamment dans les  collections du Musée d'Art Moderne de la Ville de Paris et dans celles de la  Bibliothèque Nationale (Cabinet des Estampes).     Ismaël et le chien noir : Une nouvelle inédite de Jean-Pierre Millecam,  écrivain né en Algérie et sans doute le plus important romancier français de  la guerre d'Algérie. Millecam a vécu une trentaine d'années au Maroc et a  dressé de ce pays un tableau saisissant, également éloigné du misérabilisme  et d'un exotisme de pacotille. Azouzi, lisant ce texte, a été frappé par la  rigueur de sa composition et la violence de certaines de ses scènes ; mais  aussi par l'ouverture sur l'avenir qui marque le dénouement. Voilà pourquoi  le titre de l'ouvre a été imprimé en vert, couleur de l'espoir.

25 exemplaires typographiés sur Vélin d'Arches et rehaussés de peintures de  Azouzi. 1.000 ex. courants.

Le creux du corps Poèmes, peintures et gravure de Mohamed KACIMI

    Figurer l'infigurable : le projet est d'un démiurge ; c'est celui de  Kacimi. Le corps, la chair humaine avec son poids de douleur, de rêves et de  passion, le creux du corps donc, entrent dans l'espace de la composition.  L'acte de peindre devient ainsi ouverture de soi, et de la mémoire que  charrie le sang, pour que s'extériorisent les figures portées en creux, et  qui remontent des profondeurs. Aux antipodes de la figuration décorative,  Kacimi peint la souffrance du corps et la fatigue de l'âme, le tourment,  l'angoisse et le bonheur d'être au monde. Ce livre, comme sa peinture - et  ici les couleurs et la parole, l'écrit et le peint, le chant et le geste se  rejoignent - témoignent de la profondeur d'une intériorité où résonnent les  drames de notre temps.

    Mohammed Kacimi, peintre, poète, créateur d'images et d'événements, est  né à Meknès en 1942. Entre deux expositions aux quatre coins du monde il vit  et travaille à Temara (près de Rabat) et à Paris. Il a collaboré avec  différents poètes (A. Laâbi, J. Sacré.) et publié, avant Le creux du corps,  un autre recueil de poèmes et de dessins, L'Eté blanc.

    Le creux du corps : 60  exemplaires typographiés sur Vélin d'Arches et  rehaussés de peintures et d'une gravure originale de Kacimi. Epuisé.

La malle de Sidi Maâchou texte d'Edmond Amran El Maleh, compositions et gravures de Tibari Kantour

    Tibari Kantour, considéré au Maroc comme l'un des plasticiens les plus  originaux de sa génération, et sans doute le graveur marocain le plus  inspiré, a exposé, au Maroc et à l'étranger, ses monotypes finement gravés  sur papier de soie déchiré, recomposé, encollé sur l'épais papier au chiffon  qu'il a longtemps fabriqué dans son atelier de Sidi Maâchou, près de  Casablanca - et, depuis deux ou trois ans, sur toile.      Edmond Amran El Maleh a su apprécier - alors qu'elle n'était pas encore  reconnue comme elle l'est aujourd'hui - l'originalité du travail de Kantour ;  il écrivit un jour un beau texte sur un travail particulier, très nouveau  chez Kantour, qui jusqu'alors travaillait exclusivement sur papier : La malle  de Sidi Maâchou. Encollées dans le livre, les compositions de Tibari Kantour  - de petit format, mais de belle venue - donnent à voir, matérialisent le  propos de l'écrivain. L'oil circule du mot à la matière, de la peinture au t exte qui l'analyse en la magnifiant. Cette circulation, qu'est-elle, sinon la  justification même du livre de bibliophilie ? Né en 1917 à Essaouira, Edmond Amran El Maleh, écrivain marocain, s'est  installé à Paris au début des années 60. Il n'a cessé, depuis, de revenir au  Maroc, à l'affût de tout ce qui s'y crée dans le champ de la peinture et de  la littérature. Il a publié sept romans (Maspéro et La Pensée sauvage) et une  étude sur la peinture de Cherkaoui (Shoof éd.). Né en 1954 à Casablanca,  Tibari Kantour vit et travaille à Sidi Maâchou, près de Casablanca, et à  Paris.

La Malle de Sidi Maâchou : 80 exemplaires typographiés sur Vélin d'Arches et  rehaussés de compositions et de gravures originales de Tibari Kantour.

Approche du désertique, précédé de Aube Chants de Mostafa Nissabouri ; peintures et sérigraphies de Houssein Miloudi

    Travail subtil, réfléchi, grand raffinement de la composition et de  l'exécution : la peinture de Houssein Miloudi n'est pas de celles-là, hâtives  et hasardeuses, qui se cherchent une raison d'être. Elle est, bien présente  devant nos yeux émerveillés de sa rencontre avec les textes de Mostafa  Nissabouri, qu'elle accompagne et parfois investit. A la somptuosité du style  de l'auteur de La mille et deuxième nuit, répond la profusion des dessins de  Miloudi, leur délicatesse, leur liberté grande.     L'écriture réinventée de Miloudi se déploie parfois, légère, dans  l'espace de la page, pour rencontrer celle de Nissabouri. Pastels, encres,  une touche d'acrylique : nombre des ressources de la peinture (sauf l'huile)  sont ici utilisées, avec une délicatesse de touche qui appartient en propre à  Houssein Miloudi. Cette peinture a, comme la poésie de Nissabouri ou l'art de  Belkahia, des racines profondes ; elle est très maîtrisée, ludique et grave à  la fois. Le regard que porte Miloudi sur le monde semble lavé de toutes les  compromissions de l'âge d'homme ; le désir joue ici comme un défi souriant à  l'anéantissement à venir, qu'annoncent les "mille saisons néantes" de  Nissabouri.     Né en 1943, Mostafa NISSABOURI compte parmi les auteurs les plus  représentatifs de la poésie marocaine de langue française. Ses écrits ont été  publiés principalement dans Souffles et Intégral, deux revues qui ont  contribué à créer l'espace culturel propice au renouveau de la littérature  dans le Maroc contemporain. Il a publié trois recueils de poèmes : La mille  et deuxième nuit, Rupture et Aube (portfolio accompagné de sérigraphies de F.  Belkahia).     Houssein Miloudi, né à Essaouira en 1948, vit retiré entre la maison  familiale, au cour de la médina souirie, et son atelier de la Scala, face à  l'océan. Ses toiles intègrent dans leur espace les signes de la culture  populaire, qu'il place en révolution sur de grands aplats de couleurs douces.  Mais c'est le papier, vieux papier mûri par le temps et sur lequel son  travail se déploie plus librement, qu'il privilégie depuis quelques années.  Miloudi a beaucoup exposé depuis 1970, au Maroc et à l'étranger (Algérie,  Tunisie, Arabie saoudite, Yougoslavie, Etats-Unis, Espagne, France, Pologne,  Belgique notamment).

Approche du désertique : 90 exemplaires typographiés sur Vélin d'Arches et  rehaussés de dessins et de sérigraphies de Miloudi. Approche du désertique précédé de Aube : 20 exemplaires de tête typographiés  sur Vélin d'Arches et rehaussés de dessins originaux de Miloudi. 1.000 ex.  courants.

 Stellaires dans la nuit des rêves Poème d'Alain Gorius ; gravure d'Abderrahim YAMOU     Depuis 1995, qui avait assisté au surgissement sur ses toiles de tout un  bestiaire antédiluvien, l'ouvre de Yamou a évolué vers, sinon d'autres  horizons - les siens restent ceux de l'ocre et de la terre brune, bien  présents dans cette ouvre au soubassement culturel africain -, du moins  d'autres formes. Les teintes restent chaudes et profondes ; les formats,  variés - mais le mystère de la vie, dans ses formes les plus humbles, et ses  interrogations immédiates, est toujours suggéré. Voilà une peinture qui, dans  sa texture, et de par les représentations qu'elle fait naître, ne peut  laisser indifférent. Une peinture réfléchie, sincère, consciente de ses  effets, qui s'interroge en nous amenant à nous poser les questions de  l'origine et du devenir - celles-là mêmes que l'on retrouve au cour des  textes d'A. Gorius. Là encore, dans ce livre très concis, et dans le  croisement des moyens d'expression, quelque chose s'est joué. Une rencontre  entre deux univers de tension secrète, nocturnes.     Alain Gorius vit et travaille à Paris et Casablanca ; il s'est ouvert un  chemin au carrefour de l'enseignement, du journalisme et de l'action  culturelle. Il a publié deux recueils en France (éd. Polder/Décharge) : Au  creux du monde et Sang noir ; ses chroniques ont paru, pour l'essentiel, dans  deux revues culturelles très présentes dans le Maroc du début des années 90 :  Vision et Rivages.  Abderrahim Yamou, né à Casablanca en 1959, réside en France depuis 1978. Il  vit et travaille en région parisienne. A notre connaissance le seul artiste  marocain à avoir étudié la biologie et la sociologie avant de se consacrer  exclusivement, en autodidacte mais avec quelle énergie, à la peinture : ce  peintre n'a de cesse d'expérimenter, d'élargir son expérience en remettant en  question ses acquis. D'où les mutations, accélérées, de sa peinture. Et,  aujourd'hui, sa pratique de la gravure.

Stellaires dans la nuit des rêves : 60 exempl