Pierre Halen

Université de Metz

“Reprendre” la notion d'identité culturelle avec deux essayistes francophones : Hélé Béji, Amin Maalouf [1]

L'identité nous fait quitter le terrain de la réalité pour renouer avec celui de la métaphysique. Elle ne saurait faire partie du vocabulaire des sciences humaines. Son existence est fantomatique et fantasmatique, car ce qu'elle désigne ne peut surgir que comme un manque. Elle conduit enfin à une démission du chercheur qui s'efforce de fixer et de figer le flux du temps et du multiple, comme de tout individu pressé d'en finir avec ses propres contradictions [2] .

 

On connait le paradoxe : la notion d'identité, qui désignait ce qui est semblable entre deux objets, a fini par signifier son contraire : ce qui est différent, spécifique. Cette quasi-inversion s'explique sans doute en partie par la diffusion de certains usages contextuels, et singulièrement l'usage administratif que les États ont fait de la notion : en reconnaissant l'appartenance d'un individu à un groupe jouissant d'un statut juridique déterminé, les États certifient en effet cette appartenance au moyen de « pièces d'identité » qui précisent en même temps, — par son nom, sa date de naissance, etc. —, l'individualité concernée. On notera cependant qu'il ne s'agit pas là d'un emploi purement technique : la construction des États, opération qui n'est ni neutre ni naturelle, s'est le plus souvent accompagnée d'un discours sur la nation dont on mesure mieux aujourd'hui les implications idéologiques [3].

Certes, beaucoup d'autres éléments devraient être cités dans cette histoire de la pensée identitaire, mais ce n'est pas lieu ici de refaire l'histoire des idées politiques au xxe siècle. Notre question sera davantage de savoir où on en est aujourd’hui, s'agissant de l'idée d'identité, dans le domaine des littératures francophones, à l'heure où celui-ci est gagné par l'influence du discours « post-colonial » [4] et par le fait de la globalisation, qui n'est bien entendu pas seulement une réalité économique.

Dépasser les dualismes « modernes »

Les littératures francophones (du Sud) et leur critique ont fait un abondant usage de la notion d'identité culturelle dans un double contexte idéologique (et phraséologique) marqué par le nationalisme : d'abord celui des systèmes coloniaux, qui ont enrôlé les individus dans une structure étatique mais sous des statuts différentiels ; ensuite celui des contestations de ces systèmes, contestations qui ont visé à reconfigurer ces structures, et surtout ces statuts. Considérée dans ce double contexte, la notion d'identité ressortit à la phase moderne d'une évolution globale : au-delà de l'insertion administrative des individus à l'intérieur d'états-nations distincts, la division, lourde de conflits, entre les groupes identitaires internes (indigène vs européen, principalement) pouvait nourrir une vision dialectique de l'Histoire, celle-là même qui trouve dans l'Orphée noir de Sartre une exemplaire illustration. Au fond, même élargie à l'échelle d'une race ou d'un continent, cette conception est inséparable de la croyance que le romantisme national avait sécrétée à l'endroit des « communautés » : on était de l'une ou de l'autre, et le déplacement durable d'un membre d'une communauté dans une autre posait forcément problème, quand il n'engendrait pas des pathologies (il suffit de penser au thème obsessionnel de la fièvre dans le roman colonial, ou à la métaphore rebattue du déchirement identitaire pour les colonisés ou les migrants). Les indépendances des colonies ont donc forcément joué à la fois une carte égalitaire, destinée à mettre fin à une exploitation inéquitable des ressources naturelles et humaines, et une carte différentielle, mettant au service de l'égalité la double représentation, héritée du nationalisme colonial, du colonisé en indigène et du colonisateur en étranger, issu d'une nation et souvent d'une « race » différentes [5].

Nous sommes entrés cependant dans une autre phase, dite post-moderne, où le Sujet de l'Histoire et l'Histoire elle-même, mais aussi les rapports du Sujet aux langages et aux genres, aux univers culturels et aux territoires, en somme à ses identités, ne peuvent plus s'appréhender qu'au pluriel, soit que chacun puisse endosser tour à tour plusieurs identités, soit qu'il puisse en invoquer plusieurs à la fois, sous la forme des métissages [6]. À la logique binaire du Même et de l'Autre se substitue l'idée d'un Sujet pluriel, siège de plusieurs « Mêmes » à la fois, ou, pour le dire autrement, lieu d'accueil de l'Autre dans le Même.

Toutefois, cette évolution, bien qu'elle soit assumée explicitement en divers lieux, notamment aux Antilles, est en partie masquée et ralentie par le fait que d'autres acteurs n'en ont pas eu conscience ou, plutôt, par le fait qu'ils n'ont pas vu la nécessité ou l'intérêt de modifier leurs usages en matière de phraséologie identitaire. C'est que la vision moderne avait l'avantage de la simplicité, sinon du confort : l'Autre étant supposé extérieur, le Même pouvait toujours compter sur lui pour endosser ses problèmes. Amin Maalouf a cette formule éclairante : « N'est-ce pas la vertu première du nationalisme que de trouver, pour chaque problème, un coupable plutôt qu'une solution ? » [7]. Et de nombreux observateurs n'ont pas manqué de faire le lien entre, d'une part, la résurgence récente de réflexes nationalistes ou fondamentalistes qu'on croyait d'un âge révolu, et, d'autre part, des situations de crise ou de carence internes aux groupes concernés. La constitution discursive de l'Autre en quelque figure satanique ou seulement ennemie fonctionne alors comme un mythe : un récit qui apporte une solution imaginaire à une contradiction interne non surmontée. Il en va d’ailleurs de même lorsque l’Autre est a priori valorisé, comme cela se passe communément dans les discours sur le « dialogue interculturel ». Par exemple, dans le discours officiel de la francophonie, le thème du « dialogue interculturel » n’a fait que croître, ces dernières années. Dans le Journal de la Francophonie [8] le secrétaire général écrivait ainsi, récemment, que « L’ensemble de nos programmes traduit cette réalité multiculturelle de nos sociétés, constituant une dynamique qui ne cède jamais à la confrontation, mais privilégie, au contraire, le dialogue et l’enrichissement mutuel » (je souligne) ; pareil déni des conflits témoigne du rôle d’idéologie, au sens marxiste, que joue à présent le discours sur la « reconnaissance des différences ».

Toujours est-il qu'on se trouve régulièrement confronté à des milieux ou à des publications qui entendent la notion d'identité culturelle tantôt dans le sens moderne, tantôt dans l'autre, alors même que ces acceptions sont en grande partie incompatibles ; c'est sans doute le cas encore dans notre rencontre. Il me semble dès lors utile de prendre la mesure des évolutions qui sont en cours. Je ne m'appuierai pas sur les théories du post-modernisme, ni sur celles du post-colonial, qui, en soi, mériteraient une discussion spécifique. Je citerai par contre l'une ou l'autre de ces très claires prises de position qui ont été récemment le fait d'anthropologues alarmés de constater les dérives sociétaires, — y compris de désastreux conflits armés, divers massacres et un génocide — auxquelles a conduit, encore récemment, une compréhension anachronique et réductrice de la notion d'identité collective. Mais, dans le présent contexte, mon intention est surtout d'appeler à la barre deux essayistes francophones qui se situent à la charnière entre littérature, sciences sociales et paroles citoyennes : dans ce lieu, en effet, les prises de position opèrent un marquage idéologique plus significatif pour nous et en même temps plus efficace sans doute pour la société que si elle se produit dans le seul espace « scientifique ». Il est intéressant d'observer, par exemple, qu'un anthropologue comme François Laplantine (op. cit.) a éprouvé le besoin de consacrer un petit essai, bien senti et non moins bien écrit, à la question qui nous occupe, préférant cette formule de vulgarisation à celle d'un traité savant, plus lourdement documenté et argumenté (comme l'a fait de son côté Jean-François Bayart avec L'Illusion identitaire [9]) : c'est qu'il est devenu essentiel, sinon même parfois vital, que les sociétés contemporaines s'interrogent en profondeur à propos d'une notion qui, d'un côté, est très largement répandue dans l'usage, politique mais aussi critique, et qui continue à être ressentie comme utile par certains ; mais qui, d'un autre côté, est devenue suspecte, et suspecte du pire, pour d'autres observateurs.

D'hier et d'aujourd'hui

Nous l’avons suggéré : pour mesurer cette évolution, il est nécessaire de revenir un moment sur les systèmes coloniaux. Le cas de l'apartheid, qui en a constitué un surgeon à la fois anachronique et paradigmatique par sa radicalité, montre comment ces systèmes se sont organisés dans la plupart des cas sur la base du critère différentiel : jusqu'à la division des zones urbaines, ces régimes ont progressivement distingué des statuts, avec des retombées dans la quasi-totalité des dimensions de la vie sociale : barèmes, filières scolaires, régimes linguistiques et juridiques, lieux de socialité, etc. C'est la logique de la domination (celle de la distribution inégalitaire des biens matériels) qui régit ces statuts, avec des nuances sensibles selon les cas : il ne faudrait pas mettre dans le même sac les banlieues de Soweto dans les années 80 et, par exemple, le groupe social des travailleurs de l'Union Minière du Haut-Katanga dans les années 50, qui disposaient de certains avantages sociaux non négligeables en termes de logement, de scolarisation, de sécurité sociale, etc. Ni les habitants d'une chefferie « coutumière » de l'AEF, établie, dans les années 20, à bonne distance des villes en formation et, autre exemple, les privilégiés des « Quatre Communes » au Sénégal. Rien de commun entre ces différents statuts, sauf, précisément, l'assignation administrative à un statut différentiel, qu'on peut résumer abstraitement par la triple distinction entre « européens » et « indigènes » relevant de juridictions extra-coutumières, d'une part, coutumières, d'autre part.

Mais la logique différentielle s'exerce encore, dans ce contexte, d'une autre manière, sous la forme de ce qu'on peut appeler l'indigénisme : une tendance, dans le chef notamment de missionnaires et d'administrateurs, à prendre en compte (quitte à devoir bricoler des ajustements entre territoires administratifs et zones « ethniques ») les organisations coutumières dans ce qu'elles avaient de spécifique les unes par rapport aux autres et bien entendu aussi par rapport au mode de vie occidental. La tradition épistémologique est, à cet égard, continue, de l'ethnographe amateur des premiers temps aux ethnologues patentés par l'institution universitaire, en passant par les nombreux travaux de missionnaires fascinés par des « ethnies » où ils entendaient bien sûr introduire le christianisme, mais non une vie occidentale dont le matérialisme était ressenti comme bien plus néfaste qu'une coutume autochtone un peu aménagée. Si l'« ethnie » n'est pas, au sens propre, une invention coloniale, elle a néanmoins connu dans ce contexte une forme de caution symbolique et une forme d'organisation, donc de durcissement, qu'on ne saurait sous-estimer. Le cas du Rwanda, où il n'y avait pas d'ethnie, mais où les catégories sociales bahutu, batutsi et batwa ont peu à peu été présentées comme telles, est tragiquement exemplaire à cet égard.

Ces deux mouvements différentialistes — administratif et indigéniste — trouvent leur point de confluence dans un certain nombre d'essais globalisants, pratiquant des amalgames sans doute rapides pour l'ethnologue ou l'historien, et visant à reporter sur l'ensemble des deux catégories extra-coutumière et coutumière les traits d'une nature collective décrite d'après une image globalisante de la seconde. Le plus célèbre de ces essais est La Philosophie bantoue du Père Tempels (1945), mais, quoi qu'il en soit de son succès, cet ouvrage n'est guère qu'une saillie dans une série qui va de Die Dichtung der Afrikaner de C. Meinhof (1911) au Muntu de J. Jahn (1958) en passant par les essais de Maurice Delafosse — Les Nègres (s.d.), Les Noirs d'Afrique, L'âme nègre (1922) ou encore par l'Orphée noir de Sartre préfaçant l'anthologie de Senghor (1948). La négritude, dont il faut rappeler que le contexte d'émergence est d'abord parisien, trouve ainsi après 1945 une pertinence élargie, qui est d’abord formulée dans les termes de l'indigénisme colonial, mais qui rebondit du côté de l'anticolonialisme progressiste. On assiste alors à la formation d'une alliance objective, fonctionnellement efficace même si elle est théoriquement problématique, entre une revendication égalitariste de type socio-politique, visant à faire cesser les effets discriminants d'une domination, et une argumentation de type culturel, visant à reconnaitre les différences, au titre aussi de l’égalité, mais des « cultures » ou des « civilisations » cette fois. Quant à l'acculturation, elle continue, nonobstant tout cela, à s'exercer dans les faits jusqu'à la mondialisation d'aujourd'hui. Théorisée par l’impérialisme français des débuts sous le terme d’assimilation, elle supposait, en droit, l'application des principes qui fondent la demande égalitariste ; mais, inapplicable pour des raisons budgétaires (il eût fallu, par exemple, garantir le droit de tous les colonisés à l’instruction), elle est ensuite également devenue la cible idéologique qui symbolisait l'aliénation : on s’est de plus en plus entendu à considérer, assez étrangement eu égard à certaines réalités historiques, que le péché capital de la colonisation aurait été de ne pas avoir respecté les « cultures » colonisées, quand bien même on aurait pu, à l’inverse, lui reprocher de n’avoir pas rempli sa promesse d’un « développement » pour tous.

Cette alliance objective entre égalitarisme et différentialisme culturel est entretenue par les institutions mondiales qui sont créées après la guerre : l'Unesco officialise à partir de 1947, l'année de création de « Présence africaine », le volet culturel de la Charte de San Francisco (1947). L'année suivante, tout le lyrisme de Sartre, dans Orphée noir, ne l'empêche pas d'apercevoir le problème, mais la dialectique le sauve de la contradiction entre moyen et fin : la valorisation différentialiste de la race, au principe de laquelle, au fond, il ne peut évidemment souscrire, ne sera valable qu'un temps, promet-il, elle n'est qu'une arme provisoire dans un combat qui doit mener ailleurs.

Nouvelles approches

Le problème est que le moyen ne s'efface pas ainsi devant la fin : les valeurs inhérentes à la voie différentialiste ainsi empruntée pour atteindre un but égalitariste restent actives et ne cessent de générer des résultats qui sont tout le contraire de ce qui était espéré. Un demi-siècle après la Charte de San Francisco, il faut bien constater que le principe du « droit des peuples à disposer d'eux-mêmes », — fondé sur une notion, celle de peuple, qui avait l'avantage fonctionnel de convenir aussi bien à la droite qu'à la gauche —, a servi de caution idéologique aux fondamentalismes les plus réactionnaires aussi bien qu'à des formes nouvelles, et souvent sanglantes, d'ethno-nationalisme. Il n'est sans doute pas nécessaire de s'appesantir sur cette actualité, qui est présente dans tous les esprits.

C'est elle qui a conduit la réflexion, à la fois citoyenne et humaine, d'un Amin Maalouf, jusqu'à parler d'Identités meurtrières (op. cit.). Mais si les identités collectives sont effectivement meurtrières, quelle est encore l'utilité de pareil concept, et ne faut-il pas s'en débarrasser au plus vite ? N'est-il pas urgent de reprendre pied sur un terrain spéculatif plus solidement constitué, en renouant avec un point de vue plus concret sur les sociétés ? Le fait est que les anthropologues, de leur côté, ont depuis longtemps balayé devant leur porte, faisant amende honorable quant aux ambigüités de l'ethnologie coloniale, de toute évidence liée à l'indigénisme. Parlant de « l'ethnicité comme volonté et représentation » [10], un J.-L. Amselle s’est donné les bases d'une nouvelle pensée identitaire, parfaitement conciliable avec les analyses fonctionnalistes du séminaire consacré aux identités collectives par Ét. Balibar et I. Wallerstein à la même époque [11]. Un pas plus loin, et la définition des Logiques métisses [12] apportait une solution claire, qui me parait une véritable refondation, au casse-tête théorique et aux embrouillaminis idéologiques engendrés à ce moment par la pensée dominante du discours identitaire d'inspiration moderne. Grosso modo, il s'agit de concevoir l'identité comme une forme d'énonciation, verbale ou non, à la fois historique (un acte, dans une situation concrète de communication, et non une nature) et historienne (une combinatoire d'éléments disponibles, donc tirés du passé) ; les énoncés identitaires sont fonctionnels : ils permettent des positionnements adaptés aux circonstances ; ils sont aussi réversibles en fonction de celles-ci et, en somme, ils se révèlent inventifs à la mesure de leur capacité de métisser. Si tel est le mécanisme de base que tout acteur met chaque jour en pratique, son appréhension n’est pas nécessairement consciente : de la croyance intervient, en fonction des contextes, pour habiller en essence ce qui est devenir, ou en nature identitaire ce qui est culture ; du coup, ce dernier concept retrouve son sens propre : celui de « cultiver », et la métaphore biologique, si souvent invoquée par le discours moderne (dans le discours colonial, le motif obsessionnel du climat ; dans le discours anti-colonial, le motif des racines et du déracinement, du sol étranger, du terreau, cette forme plaisante du vieux terroir, etc.), se déplace, de l'imaginaire milieu naturel où on la circonscrivait, vers le milieu humain : la culture n'est plus ce sol et ce climat où s'épanouissent des plantes déterminées, mais un jardin où s'inventent des adaptations, des greffes, des croisements, des « branchements », éventuellement en provenance d'autres sols.

Ajoutons que, sur cette base comme sur celle des autres travaux majeurs consacrés depuis une quinzaine d'années à l'« invention de la nation » et aux « communautés imaginées », il devient en outre possible de fonder une analyse des objets littéraires et artistiques dans leur rapport aux identités collectives : non plus comme des reflets ou des représentations d'un hypothétique « fond » culturel qu'elles manifesteraient, mais comme production inventive et créatrice. Ceci, faut-il le dire, est parfaitement en phase avec l'acquis fondamental de la Nouvelle Critique des années 50 et 60, qui dénonçait le principe de la représentation, mais avec l'avantage supplémentaire, par rapport à la génération du structuralisme, de rendre à nouveau possible une articulation des rapports entre texte et société. En d'autres termes, le texte/tissu ne doit pas être lu de manière transitive comme ce qui témoignerait d'une réalité référentielle ou culturelle antérieure à lui, mais comme un lieu de production de cette réalité, à considérer en lui-même.

« L'identité charrie de la mort » [13]

Amin Maalouf est surtout connu comme romancier (Léon l'Africain, 1986, Samarcande, 1988, Le Rocher de Tanios, prix Goncourt 1993, etc.), mais il est aussi l'auteur d'un essai, Les Croisades vues par les Arabes (1983), qui le situe à première vue du côté de ce qui, dans une vision moderne, est l'Autre de l'Occident. En réalité, issu d'un de ces petits pays où les confluences multiples sont indéniables, le Liban en l'occurrence, et héritier plusieurs de traditions culturelles à la fois, Maalouf s'inscrit mal dans un espace dualiste où le Même et l'Autre seraient des entités séparées ou même séparables. Et s'il se place volontiers, s'adressant à un lectorat surtout occidental, du point de vue non occidental, ce n'est pas qu'il prise cette catégorisation, mais au contraire qu'il cherche à la miner. Il n'intitule pas son essai, selon la phraséologie moderne : Les Identités meurtries (par la colonisation, par l'immigration, etc.), mais bien Les Identités meurtrières : il ne s'agit pas seulement de dénoncer les dérives d'une idéologie, mais, plus profondément, de remonter à ce qui en faussait la base.

Dès le début, il réfute avec force le dualisme identitaire : « Moitié français, donc, et moitié libanais ? Pas du tout ! […] je n'ai pas plusieurs identités, j'en ai une seule, faite de tous les éléments qui l'ont façonnée, selon un “dosage” particulier qui n'est jamais le même d'une personne à l'autre » (p. 10). La perspective est encore un peu tainienne ; l'auteur va plus loin dans les lignes qui suivent, lorsqu'il récuse la sempiternelle question qu'on lui adresse concernant le « fin fond » de son identité, la « vérité profonde » su sujet, « comme si le reste, tout le reste — sa trajectoire d'homme libre, ses convictions acquises, ses préférences, sa sensibilité propre, ses affinités, sa vie, en somme —, comptait pour rien » (p. 11). Il ne suffit donc pas de proclamer l'évidente pluralité du Sujet, il faut encore rappeler que l'« homme libre » est l'acteur d'une culture de soi : « Mon identité, c'est ce qui fait que je ne suis identique à aucune personne » (p. 18).

Si Maalouf réagit en citoyen contre les « appartenances tribales », il réagit aussi en historien, sachant que les « pays » sont « des pages en train de s'écrire » (p. 57) et que les humains sont sans cesse amenés à trier ce qui compose leur « bagage » ; donc, amenés à choisir de garder ou de rejeter, selon le cas, parmi les éléments disponibles et en fonction des circonstances. Refusant tout essentialisme, il voit aussi la culture comme la construction de « passerelles » en direction de l'autre, et l'identité comme « une affaire de symboles, et même d'apparences » dont tout le sens est de fonctionner dans la communication (pp. 158-159) ; qui perdent donc leur sens culturel s'ils fonctionnent au service de l'incompréhension ou du conflit.

On se doute que Maalouf est particulièrement sensible à l'évolution du monde qu'on appelle « arabo-musulman », y compris dans ses groupes immigrés. À cet égard, il prône une attitude d'« ouverture », dont la « confiance en soi » serait la condition (p. 88). Il reprend la thèse des « frustrations » (pp. 101-102) éprouvées par des populations qui se sentent des laissées-pour-compte de la modernité (ici entendue dans le sens de la participation aux bénéfices matériels de l'évolution technique et commerciale). De là, il pose que « la vraie question n'est pas de savoir si nous avons affaire à un conflit entre archaïsme et modernité, mais de savoir pourquoi, dans l'histoire des peuples, la modernité est parfois rejetée, pourquoi elle n'est pas toujours perçue comme un progrès, comme une évolution bienvenue » (p. 60) : c'est ce qu'il appelle la « tentation du dépit » (p. 161). Cette tentation, note Maalouf qui analyse notamment l'histoire de l'Égypte, est entretenue par l'Occident qui « ne veut pas qu'on lui ressemble, il veut seulement qu'on lui obéisse » (p. 104) : l'anti-assimilationisme a donc fait le jeu de la domination, quand bien même il aurait proclamé le contraire.

Dans le même ordre d'idées, notons encore, chez Maalouf, une hypothèse qui peut paraitre hardie. La révolution islamique iranienne, observe Maalouf, n'a pas d'antécédent dans l'histoire de l'Islam ; par contre, elle ressemble étrangement à la révolution culturelle chinoise (p. 89). Khomeiny, Mao, même combat ? Le parallèle a ses limites, mais il est intéressant, car il suggère la filiation entre deux usages modernes et dualistes de l'identité collective. Je reviendrai dans un instant sur cette essai de mise en perspective historique du Tiers-Monde, qu'éclaire de manière plus nette, me semble-t-il, Hélé Béji.

Avant cela, observons quatre éléments encore dans la réflexion de Maalouf qui, il faut le répéter, ne pose pas au philosophe, mais réagit, au nom de ses valeurs autant qu'en fonction de son expérience, devant une doxa culturaliste qui lui parait mortifère aussi bien qu'illusoire. Le premier élément est le niveau individuel où Maalouf définit l'identité ; il y va d'un certain humanisme, centré sur la personne, mais également d'une adaptation aux réalités sociales déterminées par l'évolution planétaire de la gent humaine [14]. Si l'individu est pluriel, la communauté perd forcément de sa consistance : c'est un tissu de relations et d'histoires, ce n'est plus un destin obligatoire. Le deuxième élément est la conception encore additive de l'identité individuelle : le pluriel est celui de strates accumulées au fil de l'histoire, strates où l'individu puise sans doute à loisir, mais dont Maalouf ne va pas jusqu'à dire qu'elles puissent être, en théorie ou même seulement à l'occasion, vraiment inventées. Le troisième élément est encore un reliquat, me semble-t-il, de la vision moderne : Maalouf concède qu'il est bon de maintenir une « langue identitaire » (p. 173), bien qu'il récuse l'idée d'une « appartenance majeure », qui serait supérieure aux autres (p. 22), et bien qu'il rappelle que la langue, elle aussi, est le lieu d'un constant métissage. Le quatrième élément est une lecture encore un peu moderne et dualiste de ce qui se joue en Occident : il n'est pas sûr, me semble-t-il, que « plus les Occidentaux se modernisent, plus ils se sentent en accord avec leur culture » (p. 96), sauf à considérer que cette dernière se ramènerait au développement technique.

Ces quatre éléments suggèrent les limites de l'analyse proposée par l'honnête homme contemporain qui se contente d'avoir proposé « quelques idées ». Une approche un peu plus théorique lui aurait permis de faire un pas de plus, d'abord en prenant davantage en compte la réalité imaginaire des identités collectives, ensuite en tablant sur la nature fondamentalement inventive du processus de production discursive des identités, ensuite encore en traitant la langue plus radicalement comme un autre lieu de ralliement identitaire, enfin en s'interrogeant davantage sur ce qui constituerait la culture occidentale. Mais ce sont là des nuances, dans un tableau général dont la lucidité à l'égard des enjeux sociétaires est immédiatement perceptible.

Contre la Bête

Avec L'Imposture culturelle [15], Hélé Béji participe à cette « réflexion sereine et globale sur la meilleure manière d'apprivoiser la bête identitaire », dont Maalouf écrit que « la nécessité se fait sentir partout » (p. 204). L'auteur du Désenchantement national (1982) appartient, comme l'écrivain libanais, à la génération intellectuelle qui a succédé à celle des indépendances et à laquelle il revient de repenser l'alliance objective de l'égalitarisme et du différentialisme dont il était question ci-dessus. Cela consiste d'abord à s'étonner, avec Albert Memmi, de ce qu'elle est devenue : « c'est une ironie des temps que tous ces appels rétrogrades [aux “racines”] soient dorénavant lancés par des partisans de la transformation de nos mœurs et de nos sociétés » [16]. C'est aussi que la notion d'identité est « passée de la droite à la gauche, disons de Barrès à l'anticolonialisme et au fameux “droit à la différence” » [17], et que pareille ambigüité permet à bien des discours — pensons à celui que tient depuis longtemps l'Agence de la Francophonie — de se présenter comme progressistes à peu de frais : « Quelle bizarrerie, écrit H. Béji, que celle où le parti de la culture est à la fois celui de la domination et de la résistance ! Elle est le dada des pouvoirs établis comme celui des insurgés » (p. 113). Bizarrerie qui, pour Béji, est en réalité une « imposture ».

D'une manière générale, cette imposture a consisté à nous imposer le souci de sauvegarder les cultures (au pluriel) et de respecter les différences, en nous laissant croire qu'il s'agissait là de notre plus urgent devoir démocratique ; mais en réalité, on nous enlevait, dans le même geste, l'espérance de promouvoir la civilisation (au singulier), et même la culture. En somme, il nous reste, d'une part, un monde structuré par l'instance dominante du marché globalisé, indifférent sinon hostile à la réflexion politique : c'est une anti-culture, et même une figure de la barbarie ; et, d'autre part, pour nous en divertir, il nous reste les hochets des cultures différentes (au pluriel). Pour Béji, la mondialisation n'est dès lors pas une occidentalisation du monde, comme le suggérait Maalouf : l'Occident, depuis le « sanglot de l'homme blanc », a renoncé à sa culture et à ses valeurs ; du moment qu'il ne pouvait plus se présenter comme le seul modèle de la civilisation, il n'a pas seulement abandonné l'idée de civilisation, mais aussi les usages qu'il en avait : « La vie des agglomérations européennes offre […] un visage triste et fermé. La séparation des êtres y est poussée à un point tel que le désespoir de ne pas y trouver remède condamne chacun à se faire une philosophie de la cultiver. L'ancienne civilité n'est qu'une lointaine réminiscence, l'indifférence et la désinvolture sont les seules langues que l'on parle et que l'on comprenne » (p. 89).

Quant aux pays ex-colonisés, ils sont tombés dans le panneau en se consolant, au moyen de valorisations culturelles sans enjeu réel, de voir s'éloigner chaque jour davantage leurs espoirs égalitaristes. En réalité, les indépendances ont constitué un marché de dupes : l'alliance objective de l'égalitarisme et du différentialisme a fonctionné comme un mythe, masquant une contradiction impensée, et, en définitive, laissant une situation où s'accuse encore davantage ce qui était déjà l'échec de la colonisation en termes de progrès historique et civilisationnel [18]. À défaut de réaliser ce progrès, la tartuferie a consisté à jeter en pâture consolatoire aux décolonisés d'hier une « fierté culturelle » à même de fonctionner, pendant un temps du moins, comme idéologie consensuelle ; mais en réalité, « plus il y aura d'identités culturelles à satisfaire, et moins il y a aura de vérités à discerner » (p. 71).

De sorte que, d'un certain point de vue, les riches et les pauvres sont dans la même situation : « Les excès humains de l'efficacité produisent des ravages assez proches, finalement, des dégâts qu'entrainent de leur côté l'incurie et le sous-développement, et cette coïncidence réunit ces deux univers, pourtant si opposés, devant le même défi d'affronter des figures ressemblantes de l'inhumanité » (p. 85). En d'autres termes, « le propre de notre époque est de nous laisser culturellement démunis contre sa perte d'humanité » (p. 16) ; « la culture mondiale […] se distingue de [la civilisation] en ce qu'elle n'a plus de raison universelle » (p. 47).

Non sans provocation, Béji retrouve donc l'usage du singulier (la raison, la culture, l'humanité, la civilisation), et se sert même de l'adjectif universel : c'est qu'il lui faut opposer à l'inhumanité conquérante de la globalisation un adversaire d'un poids suffisant. Aucune des cultures particulières n'a cette capacité, et leur pluriel, qui est censé faire leur richesse, est en réalité leur faiblesse : « Le triomphe des passions culturelles en dit long sur la désaffection des individus pour les promesses de la civilisation. L'espoir qu'ils mettent en elles est le contrepoint de la déception avec laquelle ils se détournent du sort du monde » (p. 46).

La charge à laquelle se livre Béji dans son brillant essai est une analyse féroce de la cuistrerie culturaliste, à laquelle son lieu d'énonciation — une femme dans la Casbah — donne évidemment une raison d'être et une coloration toutes particulières. Exactement comme Maalouf, Béji dénonce le caractère de religion que revêt aujourd'hui l'injonction culturelle : « La nouvelle mystique culturelle s'est nourrie de toutes les déceptions politiques de notre siècle. C'est la naissance d'un dogme où chacun croit retrouver une poésie et un salut, et veut se dédommager de cette déception par une pose existentielle, par une forme triviale de pensée où se reproduisent la médiocrité et la terreur » (pp. 152-153). Comme Maalouf aussi, l'essayiste aperçoit dans cette « mystique » une réponse fallacieuse aux frustrations ressenties, eu égard à la croissance des inégalités et des exclusions.

Dans une post-modernité marquée par la confusion et les replis, il reste dès lors à repenser pour aujourd'hui une forme retrouvée d'humanisme. On ne peut le faire qu'en redonnant au mot culture un sens dépourvu de connotations ethnologiques : « toute formation culturelle se révèle dans le commerce d'un univers étranger, perdant par là même la possibilité d'une coïncidence absolue et définitive avec soi-même » (p. 57) [19]. La culture, c'était « la jouissance d'une demeure, de la rumeur des voix familières, et de la douceur ineffable d'y séjourner » (p. 91) : rien à voir avec le « narcissisme de la différence, que cultive inconsidérément l'antiracisme » (p. 99). En somme, « nous poursuivons dans l'illusion culturelle quelque chose qui s'appelle identité, mais qui n'est déjà plus que le symptôme de notre carence d'humanité » (p. 99). « L'image culturelle est devenue une sorte de substitut au souci réel de ses semblables. / En fait, la culture n'est pas la réponse à l'identité de l'homme, elle en est seulement la question. Elle ne lui dit pas qui il est, mais elle en éveille la demande. Or, l'identité de l'homme est-elle autre chose que son humanité ? La véritable question de sa culture est donc celle qui le met à l'épreuve de son humanité […] Or, l'identité en tant que telle n'existe pas, et la culture n'a de sens que comme mise en évidence de l'humain en l'homme » (pp. 119-120).

« Reprendre »

« Quand apparaissent des réalités nouvelles, écrit Maalouf, nous avons besoin de reconsidérer nos attitudes, nos habitudes ; parfois, quand ces réalités apparaissent trop vite, nos mentalités demeurent à la traîne, et nous nous retrouvons en train de combattre des incendies en les aspergeant de produits inflammables » (p. 49). L'identité culturelle, telle qu'elle est envisagée par le discours dominant issu de la décolonisation, est une de ces notions particulièrement inflammables. Il faut donc la « reprendre », selon l'expression que donne V.Y. Mudimbe à l'ensemble de sa réflexion sur le discours. La reprendre au discours colonial comme au discours anti-colonial, et mesurer, comme le fait Béji, l'imposture aux termes de laquelle, en nous pensant démocrates, nous nous privons de la raison démocratique.

Le concept de métissage apporte-t-il la solution ? Oui et non. Tantôt, en effet, il est au service du poudroiement post-moderne, dans la poussière duquel on ne voit décidément rien venir, quand bien même il multiplierait les signes identitaires : ce sont des juxtapositions sans violence, certes, mais parce que ces signes ne font plus sens dans l'« ère du vide ». Tantôt, il est au service d'une inventivité historique et critique des sociétés : en ce cas, il éclaire le réel des échanges et des constructions, et à ce titre il est irremplaçable dans la dénonciation l'illusion identitaire, ce « discours à signification nulle » [20] : il y a bien lieu d'en finir avec « […] les oppositions binaires de l'endogène et de l'exogène, de l'originel et de l'apporté, qui nous contraignent à penser l'histoire comme une “acculturation” contre laquelle l'identité serait amenée à se défendre » [21].

Mais il ne suffit pas de cette dénonciation : il faut encore réintroduire du sens et de quoi le fonder. On peut le faire, comme Béji, en « reprenant » l'héritage des Lumières, et avec lui cet usage remarquable du singulier pour la culture, la civilisation, la raison, etc. On peut aussi avoir recours, comme François Laplantine, à l'apport de Wittgenstein en recommandant « d'assumer pleinement et avec humour ce qu'il y a d'indétermination en nous », au lieu de trouver un refuge illusoire dans « des masques, des déguisements, des alibis ridicules » [22]. L'un n'empêche pas l'autre, puisqu'il s'agit toujours d'en revenir à ce que chaque humain a d'identique avec tous les autres humains : « L'inquiétude identitaire, résolument tournée vers le dedans, torture littéralement le paranoïaque qui, dans son désir de toute-puissance, sent une menace de déstabilisation à l'idée que les autres pourraient avoir quelque chose en commun avec lui » [23].

Maalouf et Béji : ces pensées refusent de venir d'un Tiers-Monde culturalisé et ne revendiquent pas une spécificité ; elles se réclament, ni plus ni moins, du genre humain. C'est à ce titre, du reste, qu'elles nous requièrent.

 

 

 



[1]       Nous empruntons ici en partie un exposé présenté au colloque : Arts, écritures du monde francophone et quête identitaire (Abidjan, Université de Cocody, 23-27 novembre 1999).

[2]       Laplantine (François), Je, nous et les autres. [Paris], Le Pommier-Fayard, 1999, p. 65.

[3]       Voir e.a. Gellner (E.), Nations and Nationalism (1983) ; Hobsbawm (E.J.), Nations and nationalism since 1780 (1990) ; Delannoi (G.) et Taguieff (P.-A.), dir., Théories du nationalisme. Nation, nationalité, ethnicité (1992) ; Girardet (R.), Nations et nationalismes (1996) ; Thiesse (A.-M.), La Création des identités nationales (1999).

[4]       Voir Moura (J.-M.), Littératures francophones et théorie post-coloniale. Paris, PUF, 1999, 184 p.

[5]            Ce qui a lieu aujourd'hui au Zimbabwe, à retardement par rapport au reste du continent, illustre bien la dualité de cet enjeu : la nationalité zimbabwéenne (égalitaire) des fermiers blancs ne les protège pas de la menace d'expulsion, et peu importe le droit à la propriété privée : R. Mugabe insiste significativement sur le fait que le problème ne relève pas des tribunaux, mais bien de la nation, instance ainsi présentée comme supérieure au droit, et dont on attend qu'elle détermine qui relève du Même et qui, de l'Autre.

[6]            Cf. Gyurcsik (M.), « Dialogue interculturel et postmodernités francophones », dans Cahiers francophones d’Europe Centre-Orientale, n°5-6, vol. 1, pp. 35-44.

[7]       Maalouf (A.), Les Identités meurtrières. Paris, Grasset, 1998, 212 p. ; p. 110.

[8]       Éditorial du n°16, mai-juin 2000, p. 1.

[9]       Bayart (J.-F.), L’Illusion identitaire. Paris, Fayard, 1996, 306 p.

[10]       Amselle (J.-L.), « L'ethnicité comme volonté et comme représentation. À propos des Peul du Wasolon », dans Annales économies sociétés civilisations, n°2, 1987, pp. 465-490.

[11]       Balibar (É.) et Wallerstein (I.), Race, nation, classe. Les identités ambigües. Paris, La Découverte, 1988, 307 p.

[12]       Amselle (J.-L.), Logiques métisses. Anthropologie de l'identité en Afrique et ailleurs. Paris, Payot, 1989, 257 p.

[13]       Laplantine (Fr.), op.cit., p. 51.

[14]       « […] nous ne sommes pas à l'ère des masses, malgré certaines apparences, mais à l'ère des individus » (p. 150).

[15]       Béji (H.), L'Imposture culturelle. Paris, Stock, 1997, 164 p.

[16]       Dans Y a-t-il un dialogue culturel dans les pays francophones ? (op. cit.).

[17]       Laplantine (Fr.), op. cit., p. 18.

[18]          De la colonisation, l'auteur donne parfois une vue plutôt cavalière ; mais elle aperçoit bien la contradiction intrinsèque, due au différentialisme : « cette incohérence qui exigeait que l'on civilisât à tout prix celui qu'on ne parvenait pas à admettre comme son semblable » (p. 34) ; « La conscience occidentale a donc lié, dans la mission de civiliser les autres, le souci de se distinguer d'eux, paradoxalement à la volonté de les convertir et de les assimiler » (p. 65).

[19]          Ce qui enlève tout sens à une proposition « évidente » comme : « il faut d'abord se connaitre soi, ensuite seulement on peut aller vers l'Autre ».

[20]       Laplantine (Fr.), op. cit., p. 19.

[21]       Laplantine (Fr.), op. cit., p. 55.

[22]       Laplantine (Fr.), op. cit., pp. 26-27.

[23]       Laplantine (Fr.), op. cit., pp. 29-30.