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Thèse
BELHADJOUDJA, Redha L'effet de suspense dans le roman policier algérien | Lieu : Alger, Directeur de thèse : Christiane ACHOUR Année : 1993 Type : Mémoire universitaire - Magister
| Notations : Résumé:
La première étape de cette recherche est un bref historique sur la naissance et le développement du roman policier dans le monde. Celle-ci permet de situer avec précision les premières publications de polars en Algérie, parues dans les années 1970-1972, sous la plume de Youcef Khader. L'apparition d'un genre littéraire nouveau sur le marché du livre algérien, plutôt dominé par une production aliénée aux thèses politiques de l'époque, a amené l'auteur de cette recherche à s'intéresser à la critique d'accueil, constituée d'articles de presse essentiellement. Les points de vue qui se dégageaient de ces discours critiques ont été complétés par des questionnaires adressés à une vingtaine de personnes, d'horizons culturel et social différents. La préoccupation du chercheur était de savoir ce que les lecteurs recherchaient -et ce qu'ils trouvaient- dans la lecture du roman policier algérien. La seconde s'intéresse aux critères de ce genre littéraire tels qu'ils ont été définis par les théoriciens du roman policier. L'intérêt d'une telle réflexion devait répondre aux questions suivantes: le polar algérien se plie-t-il aux lois fondamentales du genre? En occulte-t-il certaines? En propose-t-il d'autres? Ces différentes interrogations mènent inévitablement à l'analyse des structures, palier incontournable à une étude des contenus. L'étude de ces deux composantes du texte littéraire -ou paralittéraire, comme c'est le cas- a permis de cerner la nature de la cohabitation textuelle entre deux notions apparemment éloignées l'une de l'autre: le suspense et la surdétermination idéologique. Il a fallu, pour cela, trouver réponses à des interrogations multiples: qu'est-ce que le suspense? Est-il un sous genre du roman policier? Constitue-t-il, au contraire, un cadre générique autonome? Le roman policier peut-il se passer de suspense, lui, qui, à travers son évolution et ses mutations tourmentées, a fondé sa raison d'être sur l'effet de mystère et de peur? L'idéologie peut-elle, dans le cadre du polar, proliférer dans un rapport proportionnel à la prolifération en texte d'énigmes, de combats et de meurtres? N'y a-t-il pas un télescopage entre ces deux notions antinomiques qui, par leur seul statut, rejettent toute forme de cohabitation dans un texte policier? A la lumière des réponses apportées par ces différentes questions, le polar algérien apparaît bien comme un roman à thèse et la livraison, coup sur coup, de six romans d'espionnage, traitant en substance du conflit arabo-israélien, confirme le travail de commande -et de propagande. Youcef Khader -ou plutôt le nègre qui se dissimule derrière ce pseudonyme- a crée le contre-type algérien des héros occidentaux, déviants idéologiquement, selon Marc Riglet. Mourad Saber, l'anti-modèle, est sensé détruire l'image hégémonique de l'espion occidental raciste, réactionnaire et sexuellement dépravé. Pour chacune de ses missions, le héros est sanglé dans une armures aux mesures des ambitions arabes qui voient en lui l'ardent chevalier des causes progressistes, des idées non racistes et d'une moralité à toute épreuve. Une analyse précise des différentes imageries véhiculées dans les romans montre, cependant, que cet idéal n'est pas tout à fait atteint car Mourad Saber est, d'une autre manière, raciste et sexuellement, pervers. L'espion algérien ne se distingue, en fait, de son homologue occidental que par la nature de sa mission: défendre les Arabes. Cette pesanteur politique, jointe aux longues explications et anticipations sur l'issue du combat entre SM15 et les sionistes, enraye fatalement et lamentablement le suspense, mécanisme dynamique du polar. La série de Youcef Khader apparaît donc comme un acte plus politique que littéraire.
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