Espaces francophones tunisiens, ou Main de Fatma - Livres - Limag
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Livre

ABASSI, Ali
Espaces francophones tunisiens, ou Main de Fatma


 
Lieu : Paris,
Éditeur : L'Harmattan
Année : 2011
ISBN : 978-2-296-55513-6
Pages : 220 p.
Type : Essai
Collection, autres éditions : Histoire et Perspectives Méditerranéennes,
Notations :

AVANT-PROPOS (extrait)

Main de Fatma ! Ceci n’est pas un conte, devrais-je préciser en prélude. Les ressources génériques et stylistiques que nous offre la forme de l’essai seront ici un recours délibéré et risqué, voire un rempart. Car, le lecteur, probablement amusé d’emblée par un tel sous-titre, ne manquera pas de relever diligemment, en s’aventurant plus loin, l’usage ironique et quasi paradoxal que je fais d’un signe et de sa sémiotique, si bien cadrés dans les mémoires, les savoirs et les habitudes individuelles et collectives.

Du nom propre féminin que le colonisateur a détourné de son origine sacrale au profit d’une péjoration désastreuse , de l’aguichante amulette associée à la couleur locale de la Tunisie, ou du monde arabe en général, et de son signe très connoté dans l’ordre de la psychologie, de la culture et de la sociologie, je ne retiens qu’un signifiant délesté des lieux communs entassés sous de spécieux héritages folkloriques et autres us et coutumes. Mieux encore: considéré dans son rapport métaphorique et liminaire avec le corps de cet ouvrage, Main de Fatma se veut un signifiant restreint à sa dénotation numérale (les cinq doigts de la main, pour les cinq questions qu’on posera), et sa déclinaison féminine désigne la littérature tunisienne de langue française et, plus généralement, la francophonie en Tunisie. Ensuite, avec cette réquisition sémiologique apparemment désinvolte, il s’agit d’investir ce signifiant d’une fonctionnalité volontiers polémique dans l’ensemble des textes, pour essayer de contrecarrer des idées fausses et des réflexes stéréotypés, assez conformes au code et au décodage automatisés par la notoriété de l’objet banal et folklorique, pris dans cet essai comme une métaphore des espaces francophones tunisiens.

C’est même là toute la question ! De quel code et de quel décodage s’agira-t-il dans l’analyse de la problématique proposée? Comment et pourquoi, au sein d’une littérature et d’une culture fondamentalement arabes, une littérature de langue française et une culture francophone, issues du fait colonial , sont-elles souvent, de part et d’autre, c’est-à-dire à l’intérieur comme à l’extérieur du pays, l’alibi de certains malentendus involontaires, sinon voulus et entretenus exactement comme l’est la petite amulette dans les usages symboliques et pseudo symboliques qu’on en fait pour la commodité d’une signalétique lisse et consumériste?

Comment faire, surtout, pour être et demeurer, aujourd’hui, un francophone tunisien sans complexe, et sans fatalement renoncer à sa culture arabophone, ni en subir quelques oukases, si l’on appartient aux espaces de la francophonie par l’écriture, la recherche, l’enseignement ou la simple empathie culturelle?

Filons la métaphore, sans induire de l’inégalité naturelle des doigts de la main un dénivellement recherché pour traiter les cinq questions choisies : la femme, l’altérité, l’écriture, l’hybridité, la francophonie seraient le pouce, l’index, le majeur, l’annulaire et l’auriculaire de ces espaces francophones tunisiens.

Ils semblent prospères, mais ils pâtissant de moult incompréhensions. Comme les cinq doigts pour la main, ces thématiques sont, plus que d’autres, consubstantielles des espaces de la francophonie en Tunisie, complémentaires et, à l’évidence, susceptibles de donner le change par leurs couleurs, leurs dimensions et leurs lignes, aux plus avertis des chiromanciens parmi les critiques...